Cette nuit nous sommes passés au Sud de l'île à un endroit où les baleines sont parait-il, nombreuses. À moins d'être à la proue qui est le plus bas niveau extérieur du bateau, c'est difficile d'apercevoir des animaux marins. Ce n'est pas un point d'observation confortable ce qui laisse peu de chances de voir autre chose que les "gentils dauphins". Pour plus de détails sur ces petites bêtes, voir Gérard Lenormand ouaf ! ouaf!.
Pains aux raisins au petit déjeuner. Yes, on est jeudi. Après mes rituels habituels, bonjour au commandant, courriels, lecture des deux pages de News, je descends faire mon tour de pont.
Au ship's office, je mets un mot au capitaine Tanguy pour prévenir que je sors. Je rencontre un marin philippin qui me dit que je peux aller à bâbord mais pas à tribord car ils peignent le pont ce matin. Ce bateau est un village, on se renseigne sur l'actualité.
J'avance doucement en évitant soigneusement toutes les flaques d'eau, je me méfie de tout.
J'arrive devant une grande flaque transparente et je me demande comment je vais la traverser. Avec précaution en me cramponnant à la barre de sécurité côté mer, j'avance un pied et … ne riez pas encore, je pars en aquaplaning, évidemment c'était gluant ! là vous pouvez rire. Je me suis laissée glisser en douceur sans pouvoir éviter de me casser plusieurs ongles en pivotant pour me relever. J'étais couverte de graisse sur tout un côté. Heureusement j'avais l'équipement de sécurité adéquat : pantalon, chaussures antidérapantes mais qui ne peuvent rien contre la graisse, et casque.
Personne à l'horizon sur la coursive, je suis dispensée, au moins, du ridicule. Je nettoie un peu mes chaussures dans les flaques d'eau qui stagnent le long du bord. Avec mille précautions pour ne pas mettre de la graisse partout, je rejoins ma cabine sans rencontrer âme qui vive. Je prends une douche toute habillée ! Un peu mal au genou, quelques écorchures, rien de grave. Les bretonnes, c'est solide !
Pour tout arranger pendant que je suis sous la douche et que je retrouve un semblant de dignité, j'entends un bruit de cataracte dans la cabine. J'ai laissé le sabord ouvert et la pluie déverse des trombes d'eau par l'ouverture. J'ai un mal fou à actionner les fermetures. lLs conteneurs ont fait barrage mais la table de nuit est trempée, j'ai eu le temps de sauver mon téléphone et les livres. Ils n'ont presque rien. La moquette séchera.
Quelle matinée ! les garçons ne déclenchez pas le plan ORSEC, je vous assure que je vais très très bien !
Mes vêtements sont dans la machine à laver, ma cabine est sèche, moi aussi, je monte à la passerelle.
Ramhyrr, l'homme de quart, m'attendait. J'ai raté un phénomène météo rare. Il est déçu pour moi et m'a préparé un livre avec une illustration qui m'apprend que la pluie est tombée d'une "waterprout", "trombe" en français. Faites prononcer le nom anglais aux enfants, ils vont adorer ! C'est le nom d'un nuage spécifique au Golfe du Bengale. Cela n'arrive pas à chaque voyage, celui-là était pour moi et je n'étais ni sur la passerelle, ni à la proue. Quelle matinée pourrie.
C'était sans compter avec Guillaume. Lui travaillait à la proue et il a eu le réflexe de prendre les photos que vous voyez ci-dessous avant de se mettre à l'abri.
Ce nuage avance avec un tourbillon sous lui un peu comme un typlon. Ces pluies semblables à celle de la mousson vont devenir fréquentes, je ne laisserai plus mon sabord ouvert.
Avec des correspondants comme Ramhyrr et Guillaume je ne manque aucune information.
Le commandant monte en passerelle, nous prenons un café et je lui je raconte ma mésaventure sur la coursive. Tous les matins les marins font le tour du bateau pour détecter d'éventuelles salissures sur les coursives. Elles viennent souvent des conteneurs. Il fait tellement chaud à l'intérieur de ces boîtes en fer que, régulièrement, les contenus divers et variés fondent et dégoulinent.
Ce matin je suis descendue plus tôt que d'habitude, le bateau est tellement long, les marins n'avaient pas terminé leur nettoyage.
Les plaques graisseuses sont dangereuses pour tout le monde. Les chaussures de sécurité ne protègent pas d'une glissade sur une telle épaisseur de graisse. Le commandant est contrarié, il va signaler à l'armateur les conteneurs défectueux pour que les clients fautifs respectent les conditionnements étanches pour les matières qui peuvent se décomposer pendant le transport. Sur les milliers de conteneurs transportés qui viennent de tous les pays, il est impossible d'être certain du respect des règles.
Nous sommes au sud de l'île du Sri Lanka, en bas du Golfe du Bengale. Nous allons en droite ligne vers SUMATRA. Nous descendrons entre SUMATRA et JAKARTA à tribord et la MALAISIE à bâbord. Si tout va bien nous arriverons devant Singapour le 09 mai. Je vais enfin passer par le détroit de MALACCA.
La piscine pourrait être utilisée pour les bébés nageurs, elle doit dépasser les 33°. C'est une détente appréciable.
Ce soir début du tournoi de ping-pong. Je descends en retard (décidément ce n'est pas ma journée) et je rate le premier match. Bastien s'est fait battre par Thomas. Le deuxième match c'est le Chef Patrice contre Pierre-Emmanuel. Pour l'instant ce sont les hommes de la Machine qui se mesurent les uns aux autres. Croyez-moi, dans cette salle de sport assez exiguë il y a une dose élevée de testostérones. Qui est le chef ? ben, le CHEF… Pierre-Emmanuel s'incline sportivement. Les marins philippins et indiens ne se sont pas inscrits, ils préfèrent le basket et le karaoké.
Demain, on aura les hommes du Pont et peut-être aurons-nous droit à une bataille de Chefs, c'est-à-dire le Commandant contre le Chef. Ils ont un bon niveau tous les deux et annoncent déjà qu'ils ne se feront pas de cadeaux. Bien, bien, bien… à suivre.