Les camarades australiens sont sur le pied de guerre avec leurs sacs dans le salon à 7 h. L'immigration ne vient pas avant 8 h et avec ma "longue expérience" j'aurais pu leur conseiller de dormir car nous allons surement attendre un moment..
Le ciel est d'un bleu sans nuage, c'est un décor de rêve. Cependant il ne faut pas oublier que c'est l'hiver. Il fait froid, enfin c'est relatif, il y a une dizaine de degrés. Les dockers ont des passe-montagnes et je pense qu'ils abusent un peu ! À 8 h 45 nous pouvons descendre, nous devrons être rentrés à midi.
Une navette du port doit nous emmener à l'entrée, ensuite la sécurité nous appellera un taxi. Philip et Catherine me disent qu'ils veulent aller à pied jusqu'à la ville. Ils sont capables de marcher pendant quelques kilomètres. Je n'en doute pas mais je leur explique qu'il faut traverser un pont réservé aux voitures, ils ne veulent rien entendre. Ça commence bien !
Nous attendons un long moment sur le quai, alors je comprends la nécessité du passe-montagne. Il y a un vent glacial. Pour marcher à l'aise Catherine n'a mis qu'un pull de laine et elle est bleue de froid.
La navette n'arrive pas, le capitaine m'appelle pour me prévenir que le bateau repartira plus tard que prévu, nous pouvons rentrer à 15 h. Merci capitaine mais nous ne sommes pas encore partis !
Dix minutes plus tard, nous voyons arriver l'officier d'immigration qui vient reprendre sa voiture garée près de l'arrête du bus. Le capitaine lui a demandé de nous emmener à la sortie du port. Je pense qu'il a pitié de notre air frigorifié et malheureux, il nous propose de nous emmener en centre ville.
Il n'y a qu'en Nouvelle Zélande que le personnel du port aura été aussi serviable. Il nous fait faire le tour de la ville, qui n'est pas très grande. Elle a une très belle plage et une rue principale bordée de boutiques. Il nous laisse à l'Office du tourisme. Il a donné des indications pour le retour que je n'ai évidemment pas compris. Comme je pense revenir avec Catherine et Philip, cela me semble sans importance.
Nous prenons des cartes de la ville et je vois Catherine et Philip sortir à toute allure en me plantant là sans un mot. Que nous ne fassions pas escale commune, ça se conçoit mais il y a un minimum de courtoisie. À leur grand étonnement, je les rattrape. Je voudrais au moins savoir comment rentrer au bateau. Ils me montrent une direction en me disant qu'il y a un bus ! quoiqu'il arrive je pourrais toujours prendre un taxi, mais la situation m'agace. Je ne leur laisse pas le choix, je leur donne rendez-vous à 14 h 45 devant l'Office de tourisme. OK ? OK.
Ils partent en courant en direction de la rue marchande. Je ne sais pas s'ils ont peur de manquer de temps ou s'ils ont peur que je les suive ! je n'en reviens pas. Il faut que je me fasse au changement, les règles de savoir vivre ne sont pas partout les mêmes.
Flâner dans cette ville est un vrai bonheur de. Comme en Australie les gens sont beaux, riches et en bonne santé. Ils ne sont pas tous aussi jeunes qu'à Sydney, c'est plutôt une ville comme Nice. Pour une retraite paisible, si vous êtes riche c'est un endroit idéal. Tout est propre comme un sou neuf.
Dans les boutiques, les articles sont sélectionnés avec rigueur. Pas vu de "made in china". La sélection, je peux même aller jusqu'au mot ségrégation est partout. Même sans l'avoir lu j'aurais deviné que la majorité des habitants de cette ville est d'origine européenne. Les restaurants japonais sont haut de gamme ! le Starbucks très élégant, même les fastfoods sont nickels.
L'accueil est agréable partout. Dès la première boutique je reçois un très joli sac souvenir pour mettre ma tonne de magnets "because you are French, jolie la France". J'achète n'importe quoi, je ne sais plus ce que j'ai déjà acheté et pour qui. Bref je prends du plaisir.
J'achète mes incontournables cartes postales et je tombe sur une boutique qui semble être une poste. L'apparence est celle d'une grande boutique de souvenirs mais il y a deux guichets au fond. Je demande si je peux envoyer mon courrier et effectivement je peux. Je m'installe à une table et pendant une heure j'écris mes cartes. Tout est organisé pour le confort des touristes qui doivent être nombreux l'été. On peut acheter à boire et à manger sur place.
Il est 12 h 30, il n'est pas question que j'aille m'asseoir dans un restaurant même s'il y a des terrasses plus tentantes les unes que les autres. Le vent est tombé, il fait très bon. J'achète un plateau de sushis et je les mange tout en marchant le long de la plage de Pilot Bay qui mène au Mont Maunganui.
J'ai le choix entre monter sur le Mount ou continuer sur la baie qui contourne la ville. Je calcule qu'il me faut au moins deux heures pour faire le tour du Mont Maunganui et être revenue à l'Office du tourisme à l'heure. Donc c'est impossible, je vais sur "Marine Parade". Cette expression, qui est la même à Napier, doit être un générique pour nommer un front de mer.
Le long de la baie des dériveurs sont remontés sur le haut de la longue plage. Cela me rappelle avec nostalgie l'époque ou la même chose était possible à Préfailles. Des canoës sont également entreposés sur l'herbe qui borde la plage. Pas de gardien, pas de chaine, pas de cadenas. Cela en dit long sur la sécurité dans cet endroit.
Beaucoup de seniors très "californiens" font leur footing ou leur parcours de marche de santé quotidienne sur les planches du boulevard le long de la plage. Il y a 116 500 habitants à Tauranga, je n'ose pas imaginer la proportion de retraités ! Pour changer, je vais admirer de jeunes sportifs qui surfent avec voiles et sans voiles. Les vagues ne sont pas très hautes mais avec des rouleaux constants. Les oiseaux sont nombreux et les mouettes, bien nourries, ne sont pas farouches.
Les maisons et les immeubles du bord de mer sont haut de gamme. L'emplacement et la nature environnante sont exceptionnels. On imagine sans peine ce que devait être ce pays des MAORIS quand il a été découvert par le hollandais Tasman en 1642. Il faudra deux cents ans avant que le navigateur anglais Cook vienne en faire l'exploration en1860 et l'accrocher à la couronne.
Tauranga est le nom d'origine donné par les maoris et signifie "mouillage abrité". Tout pousse dans cette région, les arbres, les fleurs, les fruits dont les fameux kiwis, les légumes. Ce devait être un paradis. Les habitants actuels respectent le site. Des panneaux rappellent partout les mesures de protection du littoral. Une pollution faite par un cargo il y a deux ans, a laissé un souvenir traumatisant. Le long de la plage il y a des mises en garde contre des résidus éventuels de pétrole. Les côtes sont menacées partout. La proximité du port et la dangerosité de l'approche en fait un endroit lus vulnérable.
Le temps passe vite, je réalise que je suis loin du lieu de rendez-vous. Il faut que je revienne très vite. Je sens que les passagers australiens ne sont pas du genre à se préoccuper de moi. Bingo, j'arrive avec 2 minutes de retard et je les vois s'éloigner dans le parc près de l'Office du tourisme. Belle solidarité, j'arrive à les rejoindre, je ne fais même pas de remarque car je suis convaincue qu'ils ne comprendraient pas. Ils n'ont d'ailleurs aucune réaction. Tout va bien.
Nous arrivons à un arrêt de bus , il s'avère que c'est une navette qui nous emmène directement au port. En chemin, nous récupérons trois marins de l'Utrillo qui ont seulement eu le temps d'aller au Centre des Seafearers, qui bien sûr existe aussi dans ce port.
Nous arrivons au bateau pour apprendre que nous ne partiront qu'à 19 h. Nous aurions pu rester plus longtemps dans la ville, l'équipage avait surement d'autres soucis en tête que de nous appeler pour nous prévenir. Mais non, nous ne sommes pas en croisière !
En arrivant devant ma cabine, je trouve Sherwenn, le troisième officier, installé sur la coursive avec son PC. Il a réussi à choper un fournisseur d'accès et à se procurer le code d'accès. J'arrive aussi à me connecter. Pas facile de stabiliser, mais j'arrive à récupérer mes courriels de ma boite normale et à répondre à ceux qui n'ont pas l'adresse de ma boite sur le bateau. Je regrette moins de ne pas être restée en ville.
Il fait beau et le coucher de soleil est magnifique sur la baie, les îles, le port.
Une secousse, le bateau démarre, les connexions sont coupées, je passe un dernier appel avant que le réseau du téléphone ne s'arrête aussi. Je monte à la passerelle suivre la sortie du port dans la nuit.
Il n'y aura pas d'autre escale avant Manzanillo dans une vingtaine de jours.